Phosphènes          2025, tirage argentique, 60 x 40 cm


Enfant, quand le sommeil se faisait attendre, je me concentrais sur les phosphènes qui dansaient derrière mes paupières. Elles étaient les compagnes silencieuses de mes nuits, une présence diffuse et familière. Ainsi, l’obscurité devenait une matière vivante et vibrante, une expérience fascinante.

Ces photographies replongent dans ces souvenirs et abordent l’insomnie comme une parenthèse sensorielle. Elles donnent forme à cette hyperactivité cérébrale, dessinent un paysage mental mystérieux et invitent à explorer ce qui échappe au regard, à se laisser captiver par les charmes de l’indiscernable. Dans son refus, le sommeil devient un espace intérieur, un lieu de passage entre le corps et l’esprit.

Un phosphène est une impression de lumière qui survient sans qu’aucune lumière ne parvienne jusqu’à l’œil. Il résulte généralement d’une stimulation de la rétine ou de l’excitation du cortex visuel. Ils peuvent prendre la forme de lueurs mouvantes ou de halos colorés. En état d’insomnie, alors que le corps repose dans l’obscurité et que l’esprit reste en éveil, l’apparition des phosphènes est plus fréquente et plus intense.


Parution dans la revue Di #3 “Insomnie”

L’insomnie n’est pas qu’une privation ; elle est une alternative, un espace suspendu, libre de toute contrainte temporelle, où la perception se réorganise autrement. Loin d’être une absence, elle devient une exploration, un moment où réel et imaginaire s’entrelacent. Dans cet état, la perception s’aiguise : l’obscurité n’est jamais absolue, elle palpite, vibre, se peuple d’éclats diffus et de rémanences colorées. Des images surgissent sans être convoquées, telles des projections internes aux contours flous et incertains.