Un transfert est une technique de restauration de peinture consistant à déposer la couche picturale d’un tableau sur un nouveau support. Cette opération est utilisée en dernier recours lorsque le support précédent et/ou sa préparation sont défectueux et qu’un refixage comme toute autre forme de consolidation n’est pas envisageable. Il s’agit d’une solution extrême et irréversible à réaliser avec délicatesse.
J’ai eu la chance de pouvoir apprendre et réaliser cette opération sur une toile du peintre normand Jacques Pasquier avec mon grand-père. Il m’a transmis son savoir, qu’il a lui-même appris de son père également restaurateur de peinture. La transmission, la filiation et la mémoire sont des notions fondamentales dans ma pratique.
Je fais une analogie entre le support endommagé d’une peinture avec la perte de la mémoire d’un événement ou d’une expérience vécue. Les transferts que j’ai réalisé vise à enfermer dans la trame du tissu les restes de cette mémoire incomplète.
Ce nouveau support aussi délicat dans sa mise en place et brute dans son aspect permet de recueillir l’image dans le creux de ses mains. De la toucher, la manipuler et de connecter ces espaces vécus ensemble. L’image est détériorée, la trame de la toile prend le dessus sur le souvenir, mais en l’emprisonnant, elle met un terme à sa destruction.